Galo et menaces de mort : pas de subvention régionale pour le cercle celtique de Rennes

Une subvention pour cercle celtique de Rennes a été retirée du vote par le président du conseil régional, suite à une intervention de Bernard Marboeuf (Majorité présidentielle, Nous la Bretagne) qui a signalé qu’un salarié de cette association avait tweeté en soutien au militant du galo, condamné pour menaces de mort contre la conseillère régionale, Stéphanie Stoll.

Retrait d'une subvention au cercle celtique de Rennes à cause d'un tweet d'un salarié  soutenant le militant du galo condamné pour menaces.
Dans le métro de Rennes, poésie en galo.

En général, les débats dans l’hémicycle du conseil régional de Bretagne sont plutôt feutrés, bien que cinq listes s’étant maintenues au second tour en 2021, les oppositions offrent une réelle variété de prises de position. Le fait que, depuis les dernières élections, le président de Région, Loïg Chesnais-Girard ne dispose pas non plus d’une majorité absolue pousse, en revanche, à des compromis et la majorité à ne pas se fâcher trop frontalement avec toutes ses oppositions.

Dans l’institution régionale, une grande partie des choses sont en fait décidées en commission permanente, une institution où tous les groupes sont représentés. Les échanges sont en général très techniques : on vote telle ou telle ligne de subvention. Autant dire que les échanges sont rarement tendus et que rien ne filtre dans la presse.

Et pourtant, la commission permanente du 25 septembre 2023, a été marquée par un évènement inhabituel. Bernard Marboeuf a en effet demandé, préalablement, au président Chesnais-Girard de « retirer du vote une subvention pour le cercle celtique de Rennes ». Ce qui a été accepté, même si, techniquement, il s’agit du retrait d’un bordereau de subventions, qui pourra ensuite être réintégré. Reste que cet épisode n’est pas banal.

Menaces de mort

« J’ai rappelé qu’un des salariés du cercle celtique de Rennes avait tweeté en soutien à la personne condamnée pour menaces de mort contre la conseillère régionale Stéphanie Stoll », indique Bernard Marboeuf.

En effet, le 13 septembre, un militant pour la langue galèse a comparu et a été condamné à un stage de citoyenneté et à verser 1250 euros à l’élue régionale. Il avait posté une photo de sniper, avec un canon de fusil, en réponse à un tweet de Stéphanie Stoll qui parlait de la place du breton et avait mentionné le galo entre parenthèse.

Lire aussi : un militant du galo comparait pour menaces de mort contre une élue

A l’audience, Stéphanie Stoll a fustigé une “mouvance extrêmement inquiétante de violence sur les réseaux sociaux ». Suite à cet épisode, sur son blog, elle a aussi estimé que ce militant « radical » du galo était celui « qui a inventé la brigade Albert Poulain, c’est-à-dire un an et demi avant que cette « brigade » ne se fasse connaître pour le vol de panneaux en breton dans plusieurs communes de l’est de l’Ille-et-Vilaine puis leur restitution, un mois plus tard, à Carhaix. »

Pour bien comprendre, il faut rappeler que Stéphanie Stoll, avant d’être élue au conseil régional, a été la présidente du réseau d’écoles en breton, Diwan. Pour elle, ce militant condamné, « est également l’inventeur d’un néologisme, très peu usité à part par lui, autour duquel il construit un discours de haine : les « jacobreizh », des abominables hybrides politiques, à la fois jacobins et militants de la langue bretonne, auxquelles il attribue une haine du gallo. Ces oiseaux-là, il les déteste tellement qu’il leur promet, au choix, de les gifler, de s’en occuper à la retraite, de leur faire péter les plombs, de les poursuivre sans relâche, de les sortir de chez nous, de les traîner plus bas que terre, de régler le problème rapidement, de les dégager, de les boxer… »

« Soutien à une élue« 

A la suite de l’article du Penn-Bazh sur cette affaire de menaces, quelques tweets « de soutien » à la personne condamnée (qui, pour sa part, a regretté les faits à la barre), selon « Nous la Bretagne »,ou « minimisant la gravité des faits » sont apparus sur le X (ex-tweeter), notamment de jeunes militants du galo, dont l’un serait salarié au cercle celtique de Rennes.Une structure où le militant du galo condamné donnait d’ailleurs des cours de langue.

Pour Bernard Marboeuf, qui est dans le même groupe politique que Stéphanie Stoll (majorité présidentielle / Nous la Bretagne), « il s’agissait d’apporter mon soutien à une collègue qui est intègre et qui a eu gain de cause devant le tribunal. Compte-tenu de la condamnation pénale, j’estime qu’on ne peut pas donner une subvention à une association où des salariés soutiennent quelqu’un qui a été condamné. Cela n’a rien à voir avec le galo, c’est une question de principe. »

Avec satisfaction, il constate que le président a retiré la subvention, mais s’étonne aussi de l’absence de réaction de personnes référentes sur cette question.

Kaourintine Hulaud rejette « toute forme de violence »

Nous avons interrogé par mail Kaourintine Hulaud, l’élue la plus investie dans la défense du galo dans la majorité de Loïg Chesnais-Girard. « Tout d’abord, je tiens à vous affirmer que je rejette toute forme de violence quelle qu’elle soit, indique-t-elle. Il est inadmissible que Madame Stoll ait subi une telle attaque par un tweet aussi inapproprié et violent. Ce n’est pas ainsi que je conçois la notion de dialogue, quand bien même les avis des parties sont divergents »

Concernant le militant impliqué pour les menaces, elle estime que « Cette condamnation a aussi malheureusement un effet préjudiciable sur l’image de la communauté militant pour la langue gallèse. Cette affaire illustre une forme d’hostilité malsaine, qui oppose d’un côté le gallo, de l’autre le breton. Je le déplore sincèrement. . Le respect est une condition sine qua non pour contribuer à la survie de nos langues.  C’est uni que nous pourrons sauvegarder nos langues qui sont de plus en plus en danger et non en les mettant en concurrence. »

Concernant ce qui c’est passé en commission permanente, Kaourintine Hulaud estime que « pour ce qui est du retrait de la subvention au cercle celtique de Rennes, j’ai regretté cette décision car le Cercle celtique est un acteur culturel majeur, défenseur DES langues de Bretagne. » Avant de conclure : « les droits linguistiques doivent permettre aux habitants des territoires de Bretagne d’apprendre ou de s’exprimer dans la langue de son choix et d’être fiers de la langue de leurs devanciers. Les associations font un travail remarquable pour soutenir leur présence. Ce n’est pas un acte isolé qui doit remettre en cause l’action de l’ensemble des militants. »

Le cercle celtique de Rennes « s’oppose à toute forme de radicalisation »

Philippe Ramel, président du Cercle celtique de Rennes, nous a répondu le 10 octobre et apporte les précisions suivantes : « Il n’appartient pas au Cercle Celtique de commenter, ni de  porter un jugement sur une décision de justice. Il y a eu une attaque inacceptable qui conduit à une plainte. La justice est saisie et fait ce qu’elle doit faire. » 

De même, il rappelle que : « Le Cercle Celtique s’oppose à toute forme de radicalisation dans tous les domaines. Nous oeuvrons au quotidien pour le respect des personnes et pour un dialogue interculturel permanent y compris au sein des acteurs culturels Bretons. Pour ce qui est des langues de Bretagne, le Cercle Celtique assure la valorisation des langues de Bretagne à égale dignité, en lien avec notre territoire. Cette situation ne nous fera pas changer de cap. Nous sommes convaincus que nous serons beaucoup plus forts unis dans la revendication.

En règle générale, le Cercle Celtique n’est pas un animateur de « débats » sur les réseaux sociaux. Nous en connaissons les dangers et donc, nous nous en tenons éloignés. Nous utilisons les réseaux sociaux plutôt dans la version « Médias sociaux ». »

La réponse de Garsdupaei

Le militant du galo condamné nous a contacté pour apporter les précisions suivantes, notamment sur la décision prise en commission permanente : « Je ne souhaites pas rajouter à la polémique. Je pense que le conseil régional a fait le bon choix, puisqu’il doit vérifier le contenu des tweets avant de prendre une décision définitive. »

Concernant les affirmations de Stéphanie Stoll, il « réfute le fait d’avoir inventé le terme « jacobreizh » ou d’avoir inventé la brigade Albert-Poulain, à moins qu’elle n’apporte des preuves. Le terme « Jacobreizh existe depuis plus de dix ans, bien avant que je ne m’investisse dans le galo. C’est documenté. »

Désormais « en retrait », regrettant que « on utilise cette affaire dans laquelle j’ai reconnu mes torts et dont je me suis excusé », il invite « comme Kaourintine Hulaud, tous les acteurs à la plus grande sagesse du monde…

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