Iberdrola (2) : des personnalités dans le vent
La multinationale Iberdrola, via sa filiale Ailes Marines, construit actuellement un gigantesque parc éolien en mer en baie de Saint-Brieuc et qui provoque une vive contestation locale. Il est vrai que l’entreprise, qui se proclame championne des énergies vertes, sait bien s’entourer de personnalités…
Dans un précédent article, Le Penn-Bazh se penchait sur le passé un peu franquiste d’Iberdrola, géant mondial de l’énergie, ainsi que sur quelques affaires de corruption ou d’atteinte à l’environnement à travers le monde de ce « leader des énergies vertes »…
Iberdrolra : autant en rapporte le vent
Force est de constater qu’à défaut de stars du show-bizz parisien, Iberdrola sait aussi s’attirer quelques personnalités de premier plan aux CV des plus variés, y compris dans le monde de l’écologie. Il suffit de se pencher sur l’impressionnant aéropage qui constitue le comité consultatif international d’Iberdrola (International Advisory Panel en bon castillan) pour s’en rendre compte.
Bilbao, nid d’espions…
Implantée à Bilbao au Pays basque, mais héritière de plusieurs entreprises qui ont prospéré grâce au franquisme, Iberdrola a toujours su trouver des relais dans l’État profond espagnol. Ainsi, en juillet 2020, la presse espagnole révélait que l’entreprise avait recruté le patron des espions espagnols, Sanz Roldán. Lequel possède un joli curriculum vitae… Il a été chef d’état-major de la Défense sous Zapatero et exercé diverses fonctions dans l’appareil de défense du Royaume. Un sympathique personnage, au cœur de divers scandales, notamment pour faire chanter des personnalités politiques.
Voir ici sur le site du Temps
Et sur La Croix
Côté hispanisant, on retrouve également dans le comité l’ancien président du Mexique, Ernesto Zedillo. Une sorte de champion, là aussi, qui sera le premier candidat de son parti – le Parti révolutionnaire institutionnel, le PRI – à perdre les élections en 2000 depuis près de 70 ans… Dans les années 1990, il aura privatisé et libéralisé de force son pays, provoqué l’insurrection zapatiste et vu exploser la violence des cartels de la drogue…
Toujours dans le même comité, on retrouve aussi Jonathan Hill, conservateur anglais, ancien commissaire européen. La Grande-Bretagne s’est engagée dans un ambitieux programme éolien, ce qui tombe bien, mais aussi nucléaire, ce qui tombe bien également. Iberdrola développe au Royaume-Uni un projet de centrale nucléaire avec GDF Suez.
Pas à piquer des verts ?
Beaucoup plus étonnant, on retrouve quelques personnalités écologistes européennes de premier plan dans ce comité. À commencer par l’Allemand Joschka Fischer, ancien vice-chancelier et ministre des Affaires étrangères… Il est vrai que l’Allemagne demeure un enjeu stratégique pour de nombreuses entreprises de l’énergie.
En France, on retrouve comme membre de ce comité, Laurence Tubiana. Ce qui ne manque d’interroger au vu de son CV, et particulièrement de son engagement en faveur de l’écologie. Prof à Science-Po Paris, ancienne proche de la Ligue communiste révolutionnaire et de Lionel Jospin, elle a été récemment coprésidente du comité de gouvernance de la convention citoyenne pour le climat mis en place par Emmanuel Macron.
Selon les informations de la presse espagnole, pour résumer, le chef espion espagnol Sanz Roldán touchait d’Iberdrola 240.000 € par an pour participer à deux ou trois réunions. Nous avons envoyé plusieurs e-mails à Laurence Tubiana à propos de sa participation à ce comité et sur son éventuelle rémunération. Ils sont restés sans réponse, tout comme ceux sur son analyse sur les scandales écologiques et sociaux qui ont secoué Iberdrola. On peut bien entendu imaginer que Laurence Tubiana est animée d’une volonté généreuse et désintéressée de faire évoluer le géant espagnol de l’énergie vers une démarche plus respectueuse de l’environnement…
Car l’Ibère est rude…
Au regard de la longue liste des scandales et des condamnations d’Iberdrola par le passé, il est vrai qu’il y a un peu de travail. En 2016, le gouvernement régional de Castille-La Mancha a ainsi condamné Iberdrola à une amende de 700.000 € pour l’électrocution – dans des proportions alarmantes – d’aigles impériaux, de Bonelli et de milans royaux. Iberdrola s’était pourtant engagée à modifier ses lignes électriques en 2011…
En 2017, la justice espagnole avait ouvert une enquête sur une présumée hausse artificielle des prix de l’électricité… Un délit présumé qui avait déjà valu une amende de 25 millions d’euros en 2015… En octobre 2020, les habitants de Catalogne, du Pays basque et de Galice étaient d’ailleurs invités à participer à un lock-out de 30 min pour protester contre les tarifs pratiqués par les entreprises comme Iberdrola…
La lie jusqu’à la Galice
À noter que dans la péninsule Ibérique, les projets d’Iberdrola sont eux aussi contestés. Les pêcheurs galiciens, très puissants économiquement, dans le nord-ouest de l’Espagne, sont fermement opposés à deux projets éoliens en mer. La deuxième formation politique galicienne, les nationalistes de gauche du BNG, a ainsi pris position pour un littoral sans parc éolien.
Militants galiciens comme pêcheurs
dénoncent notamment le manque de rigueur d’Iberdrola sur les études d’impact sur l’environnement. Rappelons qu’en baie de Saint-Brieuc, c’est l’entreprise qui s’en est également chargée. De quoi rassurer les associations environnementalistes bretonnes ? Interrogés, plusieurs responsables nous ont fait des réponses gênées et ne souhaitent pas s’exprimer publiquement. La faune et la flore de la Manche doivent être rassurés….
Il est vrai que Galicien échaudé craint l’eau chaude… Ou l’eau de montagne. En 2009, l’eurodéputé Oriol Junqueras I Vies (Verts/ALE), évoquait ainsi un nouveau scandale environnemental lié à Iberdrola : « Les gorges du Sil, une profonde vallée dans laquelle coule la rivière Sil en Galice (Espagne), est un Sic (site d’intérêt communautaire) qui figure sur la liste des lieux protégés du réseau Natura 2000. Cette zone présente une importance écologique et paysagère inestimable et mérite par conséquent une protection toute particulière. Elle héberge, en outre, sur les versants de la rivière, de larges espaces viticoles. Toutefois, depuis quelques mois, l’entreprise Iberdrola construit dans la plus totale impunité une centrale hydroélectrique, baptisée Santo Estevo II, en profitant du laxisme des autorités de la Communauté autonome de Galice et du gouvernement espagnol face à l’absence de contrôle et à l’impact environnemental généré par ces travaux incontrôlés. Cette entreprise drague la rivière pour effectuer ses travaux, ce qui en assèche le lit, fait baisser le niveau de l’eau et porte atteinte aux habitats des espèces de flore et de faune, qui souffrent de conséquences écologiques gravissimes. »
Pour voir l’ensemble de la déclaration…
Bref, on ne peut qu’espérer que des personnalités reconnues dans la défense de l’environnement comme Fischer ou Tubiana auront une bonne influence sur les pratiques d’Iberdrola. On ne saurait imaginer que leur présence tient plus de la communication ou du greenwhashing (qui consiste à verdir son image pour être dans l’air du temps…).
Et on est détendus et rassurés pour la suite en baie de Saint-Brieuc !
À suivre…
Juste pour voir…sinon je ne suis pastropeolien le mauvais rendement de ces machines n’est jamais montré clairement!