Menhirs détruits à Carnac : quelles conséquences ?

Une quarantaine de mégalithes ont été détruits à Carnac, ces dernières semaines, pour laisser la place à un magasin Monsieur Bricolage, et ce, avec l’accord de la Ville… Un saccage étonnant, le maire de Carnac étant par ailleurs président de l’association visant à l’inscription des mégalithes du Morbihan au patrimoine mondial de l’Humanité, un vieux serpent de mer qui dure depuis des décennies. Surtout, les auteurs risquent de lourdes sanctions judiciaires.

C’est un chercheur bénévole qui a découvert l’affaire : les 37 ou 39 petits menhirs du chemin de Montauban, à Carnac, ont été récemment détruits pour faire la place… à un magasin Monsieur Bricolage. Une destruction d’autant plus surprenante eet choquante que le lieu est répertorié sur l’Atlas en ligne du patrimoine archéologique du Ministère de la Culture et qu’il est connu depuis de longues années. Le maire de Carnac, Olivier Lepick, plaide la bonne foi, après avoir délivré un permis de construire en assurant ne pas avoir connaissance de la présence de vestiges sur place.

Une affirmation étonnante, puisque la région de Carnac, soumise à une forte pression immobilière, est déjà une zone sensible. Depuis une quarantaine d’années, plusieurs sites ont déjà été détruits ou endommagés pour laisser la place le plus souvent à des résidences touristiques. Au début des années 1990, l’archéoscope de Carnac avait été construit sur un site protégé sans fouilles préalables. Il avait fait l’objet d’un attentat en 1995. Par ailleurs, le Service régional de l’archéologie (DRAC Bretagne) mène des opérations de recensement des sites depuis des années sur ce territoire…

L’excuse du maire de Carnac interroge d’autant plus que Olivier Lepick est le président de l’association Paysages de mégalithes qui oeuvre, depuis plus d’une dizaine d’années, à faire reconnaître les menhirs et dolmens du Morbihan au prestigieux Patrimoine mondial de l’Humanité de l’Unesco. Elle s’était même attachée, il y a quelques années, les services d’Yves Coppens. Originaire de Vannes et Carnac, le grand paléontologue, n’était pas parvenu, malgré des relations internationales, à clore le dossier qui fait figure de vieux serpent de mer et n’aboutit jamais, entre méandres bureaucratiques et appétits fonciers…

Yves Coppens devant un menhir de Carnac en 2014.

Bref, autant dire qu’un nouveau retard au classement de l’Unesco est à prévoir après cet « exploit » de Mr Bricolage et de la mairie de Carnac. L’Unesco est en effet intransigeant sur la protection et la valorisations des sites… L’organisation internationale a d’ailleurs « déclassé » des sites qui n’étaient pas assez mis en valeur.

A ce jour, la Tour Vauban est le seul monument matériel breton inscrit au patrimoine de l’Unesco… Un autre dossier est en cours de constitution pour les enclos paroissiaux du Finistère. Sans oublier le Fest-Noz, classé, quant à lui, au patrimoine immatériel de l’Humanité.

Mais ce n’est pas la seule sanction qui pourrait tomber sur les auteurs de ce saccage de site préhistorique : l’article 322-3-1 du code Pénal concernant la destruction, dégradation et détérioration de matériel archéologique prévoit jusqu’à 7 ans de prison et 100.000 euros d’amende. Quant à l’exécution, modification, inobservation, inexécution de travaux ou destruction non autorisée (art. L 480-1 et L 480-4 du code del’Urbanisme), c’est entre 1.200 et 300.000 euros d’amende.

A suivre…

Vous aimerez aussi...

1 réponse

  1. hamon dit :

    Je ne suis pas un spécialiste du néolithique, mais je suis étonné de voir la directrice de la DRAC tenter de minimiser ce massacre dans les colonnes d’Ouest-France alors même que les archéologues de l’INRAP, après leurs sondages de diagnostique, disaient que si cet ensemble est constitué de blocs de petites tailles, il apparaissait avec sa datation au C 14, comme l’un des plus anciens alignements du massif armoricain. Il n’y a donc pas d’alignements d’intérêt secondaire. Que n’aurait on entendu dans Ouest-France s’il s’était agi d’une modeste croix comme il en existe à tous les carrefours.
    Le problème, dans cette affaire, c’est qu’il n’y a pratiquement plus de fouilles sur le terrain. Chaque génération à l’archéologie qu’elle mérite.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *